POSTFACE
Mars : Le rêve des forêts est paru initialement au quatrième trimestre 1960 sous le titre Chirurgiens d’une planète et sous la signature de Gilles d’Argyre dans la collection “Anticipation” des Éditions du Fleuve Noir. Compte tenu des délais de parution qui caractérisaient alors cette collection, ce roman a été probablement écrit en 1958 ou 1959, tout de suite après Le Gambit des étoiles.
La version alors publiée différait sensiblement du manuscrit qui comptait environ 450 000 signes et qui fut ramené aux alentours des 300 000 signes habituels à la collection. Je dois à la vérité de dire que certaines des coupures que je pratiquai avec l’aide de François Richard, alors directeur littéraire du Fleuve Noir, éliminèrent des naïvetés et donnèrent plus de nerf à cette œuvre. Qu’il me soit permis de rendre ici un hommage à cet homme affable et courtois qui m’a appris quelques vérités élémentaires sur le travail de l’écrivain. Il y eut toutefois d’autres coupures que je regrettai davantage. C’est pourquoi la présente édition rétablit certains passages.
Mais elle n’est pas pour autant conforme au manuscrit original, ni même intermédiaire entre ses deux versions. J’ai longtemps hésité à laisser rééditer Chirurgiens d’une planète en raison de ses imperfections. Une réécriture approfondie était indispensable. Du coup, ses deux prolongements, Les Voiliers du soleil et Le Long Voyage, malgré leur meilleure facture, ne pouvaient pas non plus retrouver des lecteurs. Jacques Sadoul, qui avait salué Les Voiliers du soleil dans son Histoire de la science-fiction moderne, a fini par avoir raison de ma résistance. La trilogie de la Saga d’Argyre revoit donc maintenant le jour dans une version soigneusement révisée et substantiellement réécrite. J’espère que l’accueil du public récompensera Jacques Sadoul de sa confiance. Qu’il soit assuré de ma gratitude.
Je n’ai toutefois pas cherché à faire de ce roman un livre nouveau tel qu’il aurait pu être écrit en 1986. Trop de choses ont changé en un peu plus d’un quart de siècle non seulement dans ma façon d’écrire mais aussi dans notre connaissance de la planète Mars pour qu’une telle démarche ait eu grand sens. La planète Mars que j’imaginais à l’époque s’inspirait des ouvrages de l’abbé Moreux et de Gérard de Vaucouleurs, ainsi que des tableaux de l’immense Chesley Bonestell, récemment disparu, et non des photographies qui nous ont été transmises depuis par la sonde Viking. Peut-être était-elle plus accueillante.
J’ai donc donné à ce texte un sérieux coup de peigne, en termes de métier, et j’espère qu’il n’en convoie que mieux l’enthousiasme et l’ambition d’un très jeune auteur. Sur quelques points, je me suis permis cependant des modernisations, dans l’intérêt du lecteur, je l’espère, et en tout cas pour mon amusement. Mais les érudits de la science-fiction pourront attester que le microcalculateur qui figure dans l’arsenal des conjurés du Projet existait bien dans la première version. On dirait aujourd’hui un micro-ordinateur.
C’est sur une telle machine que la réécriture de ce texte a été effectuée. Je crois que sans elle, un Macintosh, je n’aurais jamais eu le courage de l’entreprendre. Je dois donc remercier ici François Benveniste, naguère directeur du marketing de la société Apple, qui m’a introduit à son usage, et Dominique Martel et Ellen Herzfeld qui ont guidé mon apprentissage et qui m’ont aidé de mille autres manières. Je tiens aussi à remercier Jackie Paternoster qui m’a soutenu de ses encouragements, de sa patience et de ses conseils dans cette redoutable tâche et à qui cette réédition est dédiée.
Lorsque ce roman a été écrit, aucun homme ne s’était aventuré dans l’espace. La Lune était à portée de siècles. Il semble aujourd’hui vraisemblable que des êtres humains se poseront sur Mars avant la fin de ce siècle. Il est donc normal que je dédie aussi ce livre, en toute modestie, aux hommes et aux organisations de toutes nationalités qui ont fait entrer la conquête de l’espace dans l’actualité et notamment à l’Administration Nationale de l’Espace et de l’Aéronautique (N.A.S.A.) qui fut créée le 1er octobre 1958 par le gouvernement américain et qui a sans doute inspiré l’Administration pour le Projet.
Gérard KLEIN
12 octobre 1986.